Monuments aux héros de l'armée Noire – Reims
Reconstitution 2013, journal du projet

  • Présentation     ->

    Le monument au héros de l’Armée Noire est composé d'une sculpture de Paul Moreau-Vauthier (1871-1936) présentant cinq tirailleurs, sur un socle dessiné par Auguste Bluysen (1868-1952). Inauguré à Reims le 13 juillet 1924 (photo à gauche), un monument presqu'identique avait été inaugurée le 10 janvier 1924 à Bamako, qui était en train de devenir le centre de gravité de l'AOF (Afrique occidentale française). Le monument de Reims a été démantelé en 1940 sous l’occupation allemande. Celui de Bamako est toujours en place (photo à droite).
    L'idée de la reconstitution actuelle du monument de Reims a pris corps en 2004, portée par l'association CASCADE et Sheikh Sakho et fut relayée par une volonté politique en 2008. Le projet a alors été problématisé dans le cadre de l'Association pour la Mémoire de l'Armée Noire (AMAN). Plusieurs scénarios ont ainsi été imaginés avant que la Ville de Reims ne lance un concours artistique par voie de marché public. Répondant au cahier des charges, ma proposition retenue pour ce marché, associe la réalisation d’une réplique fidèle de la sculpture de Bamako à un socle redessiné, permettant par sa forme d'arche l'ouverture à des contributions formelles de jeunes artistes rémois et bamakois : ce sera le résultat du workshop "Les adjectifs du monument" qui s'est déroulé en novembre 2013. Ce volet de l'accompagnement pédagogique, parmi d'autres qui le complètent, fait pleinement partie de l’œuvre. Il favorisera son inscription au présent, sous forme de questionnements.

    En 1924, cette sculpture était dédiée au souvenir de 1914-18 et à la dette que la France avait envers les Bataillons de Tirailleurs. S'y jouait déjà des rapports politiques épineux autour de la colonisation, totalement imbriquée à notre République déchirée entre ses principes et ses intérêts. Malgré le recul, l'écriture actuelle de l’histoire de la colonisation continue à suivre des lignes de fractures qui en se complexifiant nous permettent de dépasser les clichés (et vice-versa). Les dernières décennies du XXe siècle voyait plutôt la France et l'Afrique s'éloigner en construisant des récits historiques divergents des guerres mondiales et de l'influence coloniale. Devient-il possible d'ouvrir une phase de (re)construction mémorielle partagée ? Cette réplique du monument se situe dans une époque qui est celle du défrichage des possibles. En tant que proposition artistique dans un tel contexte (avec les soubresauts qu'il génère immanquablement), elle tente d'activer un répertoire de formes harmonieusement dissonantes, leur polysémie et un premier niveau de médiation.

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    Poème Liminaire (à L.-G. DAMAS)

    Vous Tirailleurs Sénégalais, mes frères noirs à la main chaude sous la glace et la mort
    Qui pourra vous chanter si ce n’est votre frère d’armes, votre frère de sang ?
    Je ne laisserai pas la parole aux ministres, et pas aux généraux
    Je ne laisserai pas — non ! — les louanges de mépris vous enterrer furtivement.
    Vous n’êtes pas des pauvres aux poches vides sans honneur
    Mais je déchirerai les rires banania sur tous les murs de France.
    Car les poètes chantaient les fleurs artificielles des nuits de Montparnasse
    Ils chantaient la nonchalance des chalands sur les canaux de moire et de simarre
    Ils chantaient le désespoir distingué des poètes tuberculeux
    Car les poètes chantaient les rêves des clochards sous l’élégance des ponts blancs
    Car les poètes chantaient les héros, et votre rire n’était pas sérieux, votre peau noire pas classique.
    Ah ! ne dites pas que je n’aime pas la France — je ne suis pas la France, je le sais —
    Je sais que ce peuple de feu, chaque fois qu’il a libéré ses mains
    A écrit la fraternité sur la première page de ses monuments
    Qu’il a distribué la faim de l’esprit comme de la liberté
    À tous les peuples de la terre conviés solennellement au festin catholique.
    Ah ! ne suis-je pas assez divisé ? Et pourquoi cette bombe
    Dans le jardin si patiemment gagné sur les épines de la brousse ?
    Pourquoi cette bombe sur la maison édifiée pierre à pierre ?
    Pardonne-moi, Sira-Badral, pardonne étoile du Sud de mon sang
    Pardonne à ton petit-neveu s’il a lancé sa lance pour les seize sons du sorong
    Notre noblesse nouvelle est non de dominer notre peuple, mais d’être son rythme et son cœur
    Non de paître les terres, mais comme le grain de millet de pourrir dans la terre
    Non d’être la tête du peuple, mais bien sa bouche et sa trompette.
    Qui pourra vous chanter si ce n’est votre frère d’armes, votre frère de sang
    Vous Tirailleurs Sénégalais, mes frères noirs à la main chaude, couchés sous la glace et la mort ?


    Léopold Sédar Senghor Paris, avril 1940

  • Les auteurs du monument dédoublé     <-   ->

    Le sculpteur Paul Moreau-Vauthier, né le 26 novembre 1871 est mort le 2 février 1936 dans un accident de voiture. Ancien poilu de Verdun, il a conçu de nombreuses œuvres liées à la Première Guerre mondiale, dont les bornes Vauthier érigées entre 1921 et 1927 pour matérialiser la ligne de front telle qu'elle était le 18 juillet 1918, au début de la dernière grande offensive. On lui doit aussi de remarquables sculptures : le Mur des révolutions parfois appelé Mur des fédérés bordant le Père-Lachaise et le monument du square Boucicaut, tout cela à Paris ; mais également la Parisienne pour l’Exposition universelle de 1900 et divers bustes de personnalités. Se démarquant de son père, sculpteur néo-classique, PMV affiche un style plus naturaliste. La qualité des portraits des 5 tirailleurs du monument aux Héros de l'Armée Noire atteste sa fine observation de modèles africains, peut-être au combat mais plus probablement dans l'atelier. Pour ce monument, sa complicité avec Bluysen fut naturellement renforcée par leurs liens respectifs à l'Art Nouveau et à ses créateurs phares.

    L'architecte Auguste Bluysen est né à Corbeil-Essonnes en 1868 ; il meurt en 1952. Pilier de l'architecture moderne, son oeuvre compte un grand nombre de bâtiments remarquables : La Tour LU à Nantes, aujourd'hui restaurée et devenue le Lieu unique ; le Casino de Granville ; la Villa Les Abeilles à Deauville ; Le Casino de la Forêt et l'hôtel Westminster au Touquet-Paris-Plage ; le Théâtre Daunou et le Théâtre de la Michodière à Paris ; le Casino du Lac à Bagnoles-de-l'Orne ; le Pavillon des Fleurs à Bagnoles-de-l'Orne ; Le Normandy-Hôtel et l'hôtel des Bains à Granville ; le Pavillon de la Grande Source et le casino à Vittel ; l'Hôtel des Postes Saint-Eloy à Clermont-Ferrand ; le Cinéma Le Grand Rex, à Paris (photo ci-dessus)... Très impliqué dans la Société des Architectes Modernes (SAM) fondée par Hector Guimard en 1922, il en fut président en 1935/37 et milita toute sa vie, aux cotés de Auguste Perret, pour une inscription forte de l'architecture dans son époque.

  • Le projet     <-   ->

    Dans la note méthodologique répondant au marché lancé par la ville de Reims en juillet 2012, j'ai proposé pour accompagner une réplique aussi fidèle que possible de la sculpture de Paul Moreau-Vauthier "d'ouvrir" le socle, réalisant une arche transparente sur l'horizon.
    L'arche offre ainsi 5 faces :
    1 - la face supérieure soutient la sculpture des tirailleurs en bronze créée par Paul Moreau-Vauthier et fidèlement reproduite,
    2 - les faces verticales intérieures accueillent une citation en bas-relief grandeur nature du socle originel dessiné par Auguste Bluysen,
    3 - une face extérieure soutient la plaque de texte posant le cadre historique ; sur cette plaque en granit est également gravé un QR-code liant le monument à son extension numérique.
    4 - enfin,au "plafond" de l'arche, de petits bronzes conçus par les étudiants de Bamako et Reims viendront évoquer l'histoire des Tirailleurs vue par de jeunes artistes en 2013. Ce workshop intitulé "Les adjectifs du monument" a été organisé en novembre 2013 à l'ESAD Reims, dans le cadre de la semaine folle annuelle. Cette phase participative du projet est constitutive de l'oeuvre.
    Parallèlement :
    - d'autres étudiants des 2 écoles supérieures d'Art de Reims et Bamako ont conçu et réalisé une série d'affiches qui seront exposées à la Mairie de Reims et à Bamako à l'Institut Français et pourront circuler ;
    - des enfants d'une classe de Reims (CM2) et du centre d'insertion d'enfants des Rues "Dalibougou" de Bamako, travaillent à imaginer des biographies des 5 tirailleurs du monument.

  • Partenaires, acteurs et contributeurs     <-   ->

    Commanditaire :
    la Ville de Reims.

    Acteurs :
    - les services Culture et Patrimoine, Education, et C3C de la ville de Reims, Véronique Charlot pilotant le projet ;
    - l'Atelier 960, Laurent Inquimbert et toute l'équipe des fondeurs ;
    - l'entreprise Oesterlé qui fabrique le socle ;
    - toute l'équipe qui m'aide à la réalisation de la sculpture, des moules, de l'accompagnement pédagogique : François Klein, Franck Houdégla, Yiumsiri Vantanapindu, Aurore Lantéri, Célie Falières, Alain Chauveau, Alexandre Astier, Jonathan Stab, Benjamin Just, Maria Luchankina, Pascal Zagari, Marthe Docaigne-Makhroff, Alexis Gavoty, Théodore Faure, Elie Gavoty ;
    - les écoles supérieure d'Art de Reims et Bamako, autour de leur directeurs, Claire Peillod et Abdoulaye Konaté : Tiecoura Ndaou, Mamadou Habib Ballo, Mouktari Haidara, Eric Balicki, Véronique Pintelon, Marie Proyart, les étudiants de Reims et Bamako ;
    - les enfants de Dalibougou autour de Mamadou Touré et de Tatia Gimmig, les enfants du CM2 de l'école Paul Bert autour de Corinne Akhaboune ;
    - le service culturel de l'Ambassade de France au Mali dirigé par Yves Gueymard assisté de Dominique M'silti-Bordes et Alain Credeville, qui rend possible le workshop "Actualités de la mémoire" à Reims en novembre ;
    - L'Institut Français et son directeur Lucien Roux qui accueille l'exposition d'affiches produites par les étudiants des deux écoples d'Art ;
    - Diverses entreprises associées au projet, en particulier la fonderie Rollinger et Jérôme Théret qui soutient par son mécennat la réalisation des bronzes du workshop "Actualité de la mémoire"

    Merci à Tania Klimoff, Michel Bourbon (1937-2014), Marie-Ange Buclet, Mamadou Touré, Bruno Ughetto, Sébastien Philippe, Pascal Reynaud, Sheikh Sakho, Moussa Sow, Yaya Coulibaly ; merci aux associations impliquées dans le projet : l'association CASCADE, l'association pour la réhabilitation du monument aux tirailleurs d'Afrique noire (Armatan), l'Association pour la mémoire de l'Armée noire (AMAN), l'Association pour la protection de l'oeuvre des sculpteurs A et P. Moreau-Vauthier.
    Le cadre historique et les choix artistiques de ce projet sont redevables aux recherches, écrits, films et publications de Eric Deroo, Antoine Champault, Bakari Kamian, Doulaye Konaté, Lucie Cousturier, Pascal Blanchard, Pr Iba Der Tiam, Serge Barcellini, Françoise Vergès, Nicolas Bancel, Achille Mbembé, Tierno Monénembo (...)

  • Voyage à Bamako     <-   ->

    Dès la notification du marché mi-décembre, il a fallu organiser très vite à la fois la production et un voyage à Bamako (1 au 10 Janvier 2013). Dans une période où les événements militaires se préparaient au Mali, nous avons réussi avec la directrice de l'ESAD de Reims, Claire Peillod, à organiser un voyage d'une incroyable efficacité : nouer tous les contacts permettant au projet de se réaliser conformément à mes objectifs, obtenir les autorisations et accéder au monument de Bamako avec l'aide du Conservatoire des Arts Multimédia et de son directeur Abdoulaye KONATE, obtenir un soutien formidable de la part de l'ambassade de France au Mali, rencontrer des historiens maliens et français ayant travaillé sur le sujet de la Force Noire.
    Nous étions hébergé à "Dalibougou", extraordinaire centre d'accueil et d'insertion d'enfants des rues, et le quotidien était baigné de la générosité et de l'engagement des personnalités de ce lieu. Pour toutes choses, de la plus quotidienne à la plus administrative, le soutien de Mamadou TOURE, responsable de Dalibougou, a été déterminant (chaleureux mercis à tous).

  • Place de la Liberté, relevé de la sculpture     <-   ->

    Deux jeunes sculpteurs récemment diplômés du CAMM,
    Abdoulaye Diakité et Hamidou Koumaré
    arpentaient la sculpture, et je reportais ces mesures
    sur des images homothétiques.

    Un relevé photographique orthonormé
    a également été réalisé
    selon les 4 faces et les diagonales,
    à mi-hauteur de la sculpture.

    Nous avons ainsi relevé plus de
    300 mesures d'angles et de coordonnées
    des points-clés de cette forme complexe.

  • Un lien fort Bamako – Reims     <-   ->

    Sur le plan de l'accompagnement pédagogique,
    des liens ont été formalisés entre le CAMM et l'ESAD de Reims ;
    l'Ambassade de France au Mali nous a assuré de son soutien
    pour le voyage des jeunes artistes maliens en novembre 2013.
    L'exposition d'affiche sera accueillie à l'institut Français de Bamako.

    Avec des enfants de Dalibougou
    nous avons immédiatement commencé
    à imaginer des biographies pour les 5 Tirailleurs...
    L'accueil a été plus que généreux et tous ces contacts
    ont d'emblée positionné le projet sous l'éclairage
    du lien avec le Mali.

  • Modelage de la sculpture     <-   ->

    Du 15 janvier à la fin février, s'est déroulé le modelage de la réplique de la sculpture de Paul Moreau-Vauthier. Autour d'une charpente en acier, le modelage de la sculpture a été fait en argile.

    5 personnages de 2 m à 2,30 de haut, 400 kg d'acier pour la structure, 2,5 tonnes de terre...

  • Squelette, masses et équilibres     <-   ->

    Réalisation de la charpente et de la structure métallique, puis "croûtage" (pose d'une couche d'accroche en argile)

  • Détails, textures et expression      <-   ->

    Progressivement les volumes ont été mis en place, puis les tensions des cinq corps des tirailleurs se sont affinées. Les détails innombrables et l'expression des visages ont caractérisé les étapes de finition.

  • la sculpture reconstituée     <-   ->

  • Un bataillon vosgien     <-   ->

    photo Vincent Ganaye

  • Moulage de la réplique     <-   ->

    Mars, le moulage.
    Sans interruption, nous avons ensuite réalisé un moule, élaboré après une précieuse visite des fondeurs pour établir ensemble la découpe des 34 pièces favorisant la réalisation du bronze.

  • Plans de joints et empreinte     <-   ->

    Le moule a été réalisé en silicone (couleurs chair et jaune)
    et en résine stratifiée acrylique (couleur blanche).

  • Précision des chappes     <-   ->

    Les chappes ont été nervurées et renforcées : cette rigidité s'impose pour qu'au montage du bronze, les parties s'adaptent précisément.

  • Démoulage     <-   ->

  • Transport des moules à la fonderie    <-   ->

  • Réalisation du bronze à l'Atelier 960     <-   ->

    Aussitôt transporté à la fonderie, les 34 pièces du moule ont permis la réalisation des pièces en bronze (actuellement en phase de montage). Depuis la mi-mars, ce travail, est réalisé par une équipe de fondeurs et d'artistes autour de Laurent Inquimbert, à Carcès dans le Var. Dans le domaine de l'art, l'Atelier 960 est à la fois une fonderie, un lieu d'expérimentations et de formations innovantes.

  • Un bronze à la cire perdue     <-   ->

    La technique de la cire perdue, permet de mouler des formes complexes, avec une épaisseur très maîtrisée du bronze, une qualité de surface et la fidélité de la peau du modelage. La cire est appliquée en plusieurs couches, pour obtenir une épaisseur de 5 à 8 mm. En fondant pendant la cuisson du moule réfractaire, elle laisse place au métal en fusion.

  • Préparer la circulation du métal en fusion     <-   ->

    Lorsque l'empreinte en cire est réalisée, les fondeurs disposent un réseau très précis et complexe de jets et d'évents. Tubes de cires modelés et raccordés entre eux puis à la partie haute du moule, il représenteront autant de canaux d'arrivée du bronze en fusion et d'évacuation de l'air par les points hauts de la forme.

  • La potée traditionnelle     <-   ->

    Autour de la cire et de son appareillage de jets et d'évents est dréssée une potée traditionnelle, composée de plâtre et de charges réfractaires. Ce moule cuira ensuite pendant 48h, sera renforcé avec des toiles plâtrées puis ensablé dans la fosse de coulée.

  • Quatorze coulées     <-   ->

    Le bronze chauffe à 1300° environ. Ces heures de chauffe sont employées aux derniers préparatifs, de manière rituelle et surtout rigoureuse. Chaque coulée est un moment d'intense concentration (et d'émotion). Quatorze coulées ont été nécessaires pour fondre les 34 pièces.

  • Décochage, ébarbage, sablage     <-   ->

    Le bronze a refroidi : le moule réfractaire est décoché. La grosse ciselure consiste à couper les jets et les évents maintenant en bronze... L'ébarbage complète ce premier nettoyage d'où émerge la forme. Le sablage amène ensuite les pièces à leur état de montage. Malgrè l'état encore brut des pièces, la sculpture est là...

  • Montage, assemblage     <-   ->

  • Ciselure fine, finitions et patine     <-   ->

    Pour ce travail de fonderie le délai a été très (très) court : le rythme de travail fut à la fois incroyablement soutenu et toujours méthodique. Ce souci de méthode est l'un des piliers de l'Atelier 960, central dans les enjeux de transmission du métier de fondeur d'art, dont l'atelier est l'un des principaux acteurs en France.

  • Réalisation du socle     <-   ->

    Le dessin de Bluysen citait des symbôles de l'immédiat après-guerre (le tata africain et les tranchées de 14-18).
    Dans un esprit de respect des éléments historiques, le cahier des charges du concours stipulait de citer le(s) socle(s) de 1924 sur l'une des faces du nouveau socle. En proposant cette arche qui accueille 2 bas-reliefs composés à partir de fragments originaux, ma proposition est une sorte de retournement de la peau du socle originel dans lequel maintenant on entre.

  • Moulage des fragments originaux     <-   ->

    Au mois d'avril j'ai moulé les deux fragments originaux, retrouvés dans un puits dans les années 70 et conservés aux musée du fort de la Pompelle à Reims.

  • Réalisation des bas-reliefs     <-   ->

    Nous avons ensuite réalisé deux compositions en plâtre (2,50 m de haut par 2,20 m chacune) à partir des volumes et textures moulés sur les fragments originaux.

  • Moulage des bas-reliefs     <-   ->

    Avec une technique de moulage identique à la sculpture (silicone et résine Acrystal stratifiée) nous avons réalisé deux moules de 450kg, ensuite transportés chez Oesterlé Mobilier Urbain à Lutterbach (proche de Mulhouse).

  • Début de fabrication chez Oesterlé     <-   ->

    Divers essais ont été fait dans un moule des bas-reliefs, avec la matière prévue : un basalte reconstitué sombre, poli, légèrement sablé par endroits, traité en surface avec un produit anti-tag. D'après la note de calcul du BET ICAT, des ferrailles imposantes ont été réalisées et mise en place dans les coffrages, intégrant diverses gaines pour l'alimentation électrique, l'évacuation d'eau dans les réserves pour les luminaires, le passage du cable du paratonnerre, les tirants d'assemblage, etc. Le travail chez Oesterlé est réalisé avec une rigueur extrème. La maîtrise de l'exercice étant d'allier ces grandes masses (4 fois 3.5T), la sophistication du montage malgrè les apparences cubiques et la qualité des surfaces.

  • Coffrages, féraillage, coulées     <-   ->

  • Polissage, montage et finitions     <-   ->

    Les 4 plaques ont été assemblées, polies et finies avec le traitement de surface que nous avons retenu pour protéger la matière dans le temps. Vues ci-dessus le jour de l'installation à Reims.

  • Installation du monument     <-   ->

    Le 8 novembre, le socle et la sculpture ont été installés ; transport et gruttage, ont été magistralement conduit par Bovis Fine Art, et en un temps record compensant des contretemps judiciaires. En 2014, les petits bronzes conçus par les étudiants artistes des écoles de Bamako et Reims seront ajoutés au plafond de l'arche. Le sol avait été préparé par l'entreprise Viellard, la aussi dans un délai incroyable et conformément aux prescriptions du BET, avec du tout-venant compacté.

  • Emplacement     <-   ->

    L'un des axes du projet consiste à ne pas couler de fondation en béton pour garder une mobilité potentielle du monument, permettant d'intégrer des évolutions urbaines ultérieures. Pour différentes raisons techniques l'emplacement choisi est provisoire, légèrement distant de l'emplacement originellement prévu. L'emplacement actuel offre une très belle vision sur l'horizon qui investit le socle et donne à la sculpture un cadre idéal. Mais il demeure que l'art urbain doit intégrer un critère de mobilité dans la durée : comme on l'observe de plus en plus, la plasticité organique (et économique) de la ville ne permet pas toujours de contourner les monuments...

  • Mise en place     <-   ->

    La sculpture en bronze pèse 1,5 tonne, le socle en basalte reconstitué pèse 17 tonnes.

  • La sculpture dans son cadre     <-   ->

  • Parc de Champagne     <-   ->

  • Première gerbe, ce 11 novembre     <-   ->

  • Bamako - Reims     <-   ->

    A l'occasion du dépot de la première gerbe, la présence d'une délégation d'artistes du Conservatoire des Arts de Bamako était particulèrement emblématique parmi les personnalités présentes.

  • Promenade et mémoire     <-   ->

    Les promeneurs habitués du Parc croisent les visiteurs qui attendaient le monument. L'ouverture du socle et l'expressivité de la sculpture invitent à des regards curieux et en mouvement. Accueil très positif par les divers publics.

  • Vues avec les petits bronzes installés     <-   ->

  • Une partie constituante de l'oeuvre     <-   ->

    Dès le début de la réflexion sur ce sujet, l'accompagnement pédagogique devait faire partie de l'oeuvre : les échanges artistiques caractérisent notre actualité post-coloniale, dans laquelle images, objets, monuments circulent, se répondent avec plus ou moins de complicité ou de distance critique. Parmi les liens à (re)construire dans ce contexte mondialisé, l'expérimentation artistique faite avec des artistes et designers, étudiants de Bamako et Reims (ci-dessus) permet de poser quelques questions, avec des formes. L'objectif de rétablir la symétrie des deux monuments se fonde, à 90 ans de distance, sur ces implications culturelles et politiques.
    J'ai une grande confiance dans la capacité des formes à raconter des histoires : la sculpture de Paul Moreau-Vauthier est finement composée et modelée pour évoquer la sombre aventure partagée en 14-18 ; le regard et les expressions des tirailleurs, le végétal qui absorbe les armes, sont autant de significations qui ont déterminé les nazis à détruire le bronze en 1940. En 2013, le fait de conjuguer une réplique fidèle de la sculpture pour effacer ce geste et une ouverture du monument pour l'inscrire au présent, apparaît comme une démarche hybride, très mal vécue par certains, bien comprise et appréciée par d'autres ; ces divergences et ces conflits appartiennent à l'histoire longue du monument. La proposition que nous sommes en train d'aboutir permet de prolonger le processus historique avec le respect qu'il requiert, en exploitant une qualité qu'a parfois l'art, de se vivre comme une aventure collective.

  • "Les adjectifs du monument"     <-   ->

    Ce workshop s'est déroulé à l'occasion de la semaine folle de l’École Supérieure d'Art et Design de Reims, entre le 12 et le 16 novembre. Grâce au soutien de l'Ambassade de France au Mali, 8 étudiants du Conservatoire des Arts et Métiers Multimédia de Bamako se sont joints à un groupe d'étudiants de Reims. L'encadrement du workshop était fait par Amadou Habib Ballo, Tiécoura N'Daou (de Bamako), Franck Houdégla et moi (sous l’œil avisé des deux directeurs, Claire Peillod et Abdoulaye Konaté). S'appuyant sur divers symboles, images ou formes, les objets conçus interrogent les liens culturels ou politiques de l'engagement de l'Armée Noire et la problématique coloniale qui leur est liée jusqu'à aujourd'hui; Nous avons visité la fonderie Rollinger dans les Ardennes, partenaire du projet où les objets ont été fondus en bronze. En mai 2014, ces bronzes ont été intégrés au monument. Au plafond de l'arche, il constituent une vibration de formes offrant, pour un observateur avancé à l'intérieur du socle, leur diversité comme autant de questions posées à l'histoire complexe des tirailleurs et de leur environnement colonial.

  • Affiches Bamako-Reims 2013     <-   ->

    Un workshop de création d'affiches intitulé « Place de la liberté » s'est déroulé entre avril et juillet 2013. Inauguré par une conférence de Eric Deroo à l'ESAD, le sujet proposé à des étudiants en graphisme de l'ESAD de Reims et du CAMM de Bamako était énoncé ainsi :
    Dans le cadre de la reconstitution du monument aux héros de l’Armée Noire, vous concevrez des affiches au format A2. Les propositions évoqueront l’environnement historique et culturel du monument au moyen d’expérimentations graphiques et plastiques. Cet environnement pourra être appréhendé dans tout son déploiement temporel et géographique : première guerre mondiale, période consécutive de la colonisation puis des indépendances, pluralité des récits historiques associés, actualité des relations entre le Mali et la France, géopolitique contemporaine (...).
    Le workshop a été encadré à Reims par Marie Proyart, à Bamako par Tiecoura Ndaou et Mamadou Habib Ballo.

    Première exposition : février-mars 2014 à l'Institut Français de Bamako.

    Télécharger le dossier complet des affiches réalisées par les étudiants de Reims et Bamako.
  • Biographies imaginaires des cinq tirailleurs     <-   ->

    Associer des enfants au processus de reconstitution du monument est devenu naturel lorsque je suis arrivé à Dalibougou, lieu étonnant à Bamako, centre d'insertion d'enfants des rues. Il accueille une cinquantaine de garçons et de filles qui trouvent là un réel cadre de vie, à l'écoute de chaque histoire personnelle, offert pour la durée. De manière annexe, mais agréable pour tout le monde, c'est aussi pour les voyageurs un gite (avec plusieurs chambres d'hotes) confortable et chargé d'énergie positive.
    De nombreux enfants et ados de Dalibougou connaissent l'exemplaire malien du monument, situé sur la Place de la Liberté au coeur de la ville qui a longtemps été leur espace de vie. Dès le mois de janvier j'ai envisagé de les associer au processus en réfléchissant avec eux à des biographies fictionnelles pour les 5 tirailleurs de bronze... En juillet, Tatia Gimmig, jeune artiste diplômée de l'école des Arts décos de Strasbourg est allée à Dalibougou pour les accompagner dans la finalisation de textes riches en détails, pertinents...
    Yacouba, l'un de ces auteurs en herbe a proposé ce photo-montage pour présenter aux CM2 de Reims qui vont de leur coté engager un processus symétrique entre janvier et avril 2014. Il s'agit de la classe de Corinne Akaaboune, dans le groupe scolaire Paul Bert à Reims. L'ensemble des textes et images produits à Bamako et Reims sont insérés dans l'extension numérique du monument.
    Télécharger "Une histoire des 5 tirailleurs"
    Télécharger le dossier des réalisations des enfants du CM2 de l'école Paul Bert - Reims
    Télécharger le même dossier des réalisations de l'école Paul Bert en meilleure définition.

  • L'extension numérique     <-

    Elle permet de mieux voir et comprendre les formes du monument grâce aux images qui les représentent et aux clés historiques.
    Cette extension numérique a deux entrées : l'une habituelle par le web (force-noire-monument.fr), l'autre en flashant avec un smartphone un QR-code gravé sur la plaque en granit du monument. Dans les deux cas on aboutit sur une carte (vue ci-dessous) rassemblant les différentes formes du monument, décomposées en autant de symbôles-clés. S'ouvrent ainsi des rubriques concises donnant des précisions historiques. Les illustrations seront exclusivement dessinées. Les notices sont rédigées à partir d'ouvrages écrits par des historiens africains et européens. Ce site enveloppe le monument au plus près de ses formes et de ses significations actuelles. Finition en juin 2014. Réalisation avec Théodore Faure et Alexis Gavoty.